Bordeaux Habitat
Extrait de "Bordeaux Habitat, Printemps-Eté 2011"
Extrait de "Bordeaux Habitat, Printemps-Eté 2011"
Extrait de "Le festin #81 - Monts et Merveilles"
Extraint de "Magazine Le 308" par la Maison de l'Architecture d'Aquitaine
(Invitation à une expérimentation dans le laboratoire des pôles)
Faire peau neuve de l’île Dumont Durville en y créant la base du bien-être.
A mille miles de toute terre habitée, un continent, l’Antarctique. Centré sur le pôle Sud, il est à 1000 kilomètres de la pointe extrême de l’Amérique du Sud. Englacé toute l’année (30 millions de km²), perdu dans les nuits polaires, battu par des vents cabatiques, mordu par un gel inimaginable (- 90 °C), il a pourtant toujours attiré l’homme. En 1840, le Français Dumont d’Urville découvre la Terre Adélie. En 1904, J.B. Charcot hiverne avec son bateau. Puis commence la conquête du Pôle. Depuis les hommes se sont succédés, comme Paul Emile Victor.
Aujourd’hui les aventuriers font place aux chercheurs. L’enthousiasme n’est pas moindre et les trouvailles de poids. Exemples, l’étude des glaces permet de reconstituer le climat du passé, autant de clés pour le futur de la planète : pollution, climat, niveau des mers…
Les conditions extrêmes rendent l’homme vulnérable mais également son habitation (la base). Depuis 1962, la base Dumont d’Urville a fait l’objet de nombreuses rénovations ; les conditions de travail et d’expérimentations y sont très sophistiquées et coûteuses, à l’inverse des conditions et qualités de vie (simples cabanes de chantiers) qui marquent un défaut de conception architecturale. L’homme, acteur principal du projet, vit ainsi dans un espace encore mal défini, où le confort, n’apparaît encore aujourd’hui qu’au second plan. Ce même confort est pourtant « essentiel » puisqu’il agit sur la physiologie de l’homme, ainsi que sur son travail.
Si le comportement de chacun tient d’abord à la personnalité, tous les facteurs, sociaux, d’isolement, d’éloignement, de vie en autarcie, interviennent dans la dynamique du groupe, dont dépendent la qualité de vie et l’efficacité d’une expédition. Les médecins décrivent sous le terme de « syndrome mental d’hivernage » des manifestations fréquemment observées lors des expéditions de longue durée : variations de l’humeur pouvant conduire à des tendances dépressives ou hypomaniaques, oppositions et agressivité traduisant des difficultés sociales, troubles fonctionnels ou psychosomatiques. Le plus souvent il s’agit d’attitudes et de réactions caractérielles, liées au stress induit par les multiples frustrations de la vie en petit groupe isolé face à un milieu extérieur hostile.
L’organisation dans l’île des bâtiments, et le contexte géographique, ainsi que l’utilisation des lieux, se déterminent par des notions de stress, de psychologie environnementale, de confort, d’espace, qui sont communs à tous les lieux, mais qui forment la base de données du projet.
Proposer un lieu de vie centralisé, protégé du milieu hostile tout en offrant aux habitants les moyens de retrouver des repères spatiaux temporels, sensoriels perdus, et de se ressourcer à l’aide à l’aide de fonctions essentielles et confortables, afin de retrouver le cycle familier habituel (protecteur, chaleureux, lumineux, végétal, reposant, nourrissant..).
Sous la forme d’une livraison de formes architecturales, conçues à partir de modules préfabriqués en amont et acheminés sur place, ainsi qu’une structure première synthétique, le projet est prévu pour être monté et démonté par l’homme in situ. Son cahier des charges répond aux contraintes de la H.Q.E.
Après avoir franchi la limite protectrice, l’enveloppe structurelle gonflée, les individus peuvent suivre un parcours à travers différentes boîtes à sensations, leur offrant des plaisirs simples, nouveaux ou perdus. L’interaction entre la peau composite et ces volumes déstructurés détermine le lieu public. Elle synthétise, affirme et promouvoit le rôle de place et faisant jouer et se côtoyer la végétation, les jeux de lumières, l’eau…
Les notions d’espaces, de volumes, de textures, de couleurs, de confort, ainsi que les notions de distances et de territoire sont multiples et variées, répondant aux besoins des usagers, afin qu’ils puissent appréhender et s’approprier ce lieu, comme leur rival dans ce contexte et milieu si extrême.
Cette multiplicité de contraintes, de moyens mis en œuvre, ainsi que les démarches constructives très spécifiques pour répondre au projet, placent le rôle du concepteur dans une posture inhabituelle, indispensable, novatrice, si on attend de lui une réflexion et des solutions concrètes dans ce milieu hostile extrême.
Extrait de "Une architecture pour le continent de l'extrême : l'antarctique (invitation à une expérimentation architecturale dans le laboratoire des pôles)" par Bérangère Signac.